Les rites d’expiation et de réparation
(prāyaścitta) ne sont peut-être pas centraux pour l’histoire
du Mantramārga (le tantrisme śivaïte), mais ils nous offrent un angle
d’approche enrichissant pour contempler
l’évolution de cette grande tradition religieuse. Au lieu
de se concentrer sur la genèse et la défense philosophique
des doctrines śivaïtes, ou sur les pratiques rituelles et sur les
théories développées pour expliquer et
justifier de telles pratiques, cette étude met l’accent
plutôt sur les dimensions sociales de la religion. Ce livre contient
une première édition et une traduction d'un
recueil sud-indien de rites śivaïtes de prāyaścitta compilé
par Trilocanaśiva, un théologien du XIIe siècle connu
surtout pour sa Siddhāntasārāvalī, un traité métrique sur
l’école du Śaivasiddhānta qui est toujours
étudié de nos jours dans les écoles
traditionnelles du pays tamoul. Trilocana ne révèle pas
l’identité des sources qu’il cite, dont beaucoup
ne nous sont pas parvenues, mais un certain Hṛdayaśiva, un auteur nord-indien,
de Malwa, a rédigé un autre compendium, plus ancien, sur
le même thème, qui consiste uniquement en de grandes
citations étiquetées, généralement
des chapitres entiers, provenant pour la plupart des mêmes sources.
Nous avons donc inclus en annexe une transcription intégrale du
manuscrit le plus ancien qui transmet cet ouvrage, un manuscrit
népalais sur feuilles de palme daté de 1157 de notre
ère et conservé à Cambridge. Un index commun
des pāda permet aux lecteurs de s’orienter dans les deux ouvrages de
Trilocana et de Hṛdayaśiva. Notre introduction tente de retracer les changements
sociaux au sein du Śaivasiddhānta qui nous permettent de contextualiser
l’évolution des rites śivaïtes de
réparation.
Rites of expiation and reparation (prāyaścitta) may not seem central
to the history of the Mantramārga, but they provide a fascinating angle from
which to view the evolution of this broad religious tradition. Instead of
focussing on the evolution and philosophical defence of Śaiva doctrines, or on
the examination of ritual practices and of theories developed to justify and
shore up such practices, this study puts the spotlight instead on social
dimensions of the religion. This book contains a first edition and translation
of a South Indian compendium of Śaiva expiation rituals compiled by
Trilocanaśiva, a twelfth-century theologian celebrated for his
Siddhāntasārāvalī, a metrical treatise on the Śaivasiddhānta that is still
traditionally studied in the Tamil-speaking South today. Trilocana does not
reveal the sources from which he quotes, many of which are lost to us, but an
earlier Northern treatise on the same theme from Malwa by a certain Hṛdayaśiva
consists only in large labeled quotations, typically whole chapters, from those
sources. A Nepalese palm-leaf manuscript kept in Cambridge that is dated to 1157
AD may be the earliest surviving codex to transmit Hṛdayaśiva’s text
and we have included a complete transcription of that manuscript as an appendix.
A combined quarter-verse-index helps readers to navigate both
Trilocana’s and Hṛdayaśiva’s works. Our introduction
attempts to trace the social developments within the Śaivasiddhānta that give
context to the evolution of Śaiva reparatory rites.